mercredi 5 février 2014

RECIT DE VOYAGE AU PORTUGAL

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Séjour au Portugal
du 21 juin au 05 juillet 2013

Porugal  Photo P Nicolas
  

Vendredi 21 juin

15h35. Nous quittons l’aéroport de Poitiers en espérant, aussi, quitter cette grisaille couvrant la France depuis plusieurs semaines. 
Gagné ! Dès le survol du golfe de Gascogne, un ciel bleu uniforme balaie ce triste temps. Le soleil nous accompagne pendant les deux heures de vol jusqu’à Porto. 
Avant de se poser l’avion longe le littoral atlantique à basse altitude nous permettant de distinguer la découpe de la côte ; la violence du contraste entre les plages blanches, éblouissantes sous le soleil, et le bleu si sombre de la mer est surprenante.

Une agréable chaleur nous enveloppe en descendant de l’avion à Francisco Sá Carneiro. Porto étant la seconde ville du pays je m’attendais à un aéroport plus important, celui-ci n’arrive qu’en troisième position derrière Lisbonne et Faro. 
Le décalage horaire d’une heure jouant en notre faveur, il n’est que 16h40, ici, au Portugal.

Un taxi nous conduit à Porto, 11 km au sud-est de l’aéroport. S'il y a peu de monde sur la route en ce milieu d’après-midi, la circulation se densifie une fois en ville. Approchant de l’auberge Oporto Poets Hostel, où nous avons retenu trois nuits, je reconnais le quartier longuement consulté sur Google Streets pour préparer ce voyage. L'accueil est chaleureux.
Située au premier étage, notre chambre est immense ; elle offre une superbe vue panoramique sur la vieille ville et ses monuments. En face se dresse la cathédrale.
Portugal. Photo P Nicolas
Portugal  Photo P Nicolas
Porto s’étend sur les deux rives d’un fleuve aux berges escarpées le Douro (on prononce Doro). Rive droite où nous sommes, le centre-ville couvre plusieurs collines. Nous avons beau nous pencher aux fenêtres pour apercevoir le fleuve en contrebas, à droite, impossible, celui-ci demeure caché par les toits des maisons. Le Douro est si encaissé qu’aucune démarcation n’est perceptible entre les toits en tuile des deux rives. 

Une fois les bagages rangés, nous effectuons quelques courses dans le quartier avant de dîner au rez-de-chaussée où une vaste pièce fait office de cuisine, salle à manger, salon. 
Portugal  Photo P Nicolas
Nous descendons ensuite vers le fleuve par des ruelles pittoresques, extrêmement pentues, qui débouchent sur des artères plus larges. Le nombre d’immeubles abandonnés ou à vendre dans le cœur historique de la ville trahit l’ampleur de la crise économique frappant actuellement le pays.

Portugal  Photo P Nicolas
Des préparatifs de fête sont visibles un peu partout en prévision de la nuit de la Saint-Jean, la plus grande fête de la ville. Elle se déroulera de dimanche soir à lundi matin. Circuler en voiture devient impossible, ce jour-là, toute la population descendant dans la rue.

Longeant les quais nous arrivons au pont Dom Luis 1er, ouvrage métallique spectaculaire possédant deux niveaux de circulation. Le tablier bas, réservé aux véhicules et aux piétons, le tablier haut, beaucoup plus long, qui relie la partie haute des deux rives presque en à-pic à cet endroit. Ce tablier haut est réservé au métro et aux piétons, les vélos l’empruntent aussi. 

Portugal Photo P Nicolas
La structure générale du pont me rappelle le viaduc de Garabit construit dans le Cantal par Gustave Eiffel en 1884 et dont la couleur rouge m’a toujours étonné. Cependant, Garabit ne possède qu'un tablier haut sur lequel passe le train. 
Cette ressemblance n’est pas surprenante puisque c’est Théophile Seyrig, l’associé d’Eiffel qui a réalisé le pont Dom Luis 1er entre 1881 et 1886.
Néanmoins, Garabit pourrait bien n’être qu’une réplique du Ponte Maria Pia, réservé lui aussi au train et construit plus en amont par Eiffel vers 1877.




 Samedi 22 juin

Portugal  Photo B Nicolas
Il fait beau et la météo annonce le même temps pour les jours suivants. Quel bonheur après plusieurs semaines de grisaille ! La salle à manger est déserte lorsque nous descendons prendre notre petit déjeuner.
 Nous quittons l’auberge et partons à la découverte de la ville en suivant un itinéraire différent de la veille. 
Là encore, nous rencontrons un certain nombre de maisons et immeubles, tantôt abandonnés, tantôt à vendre. L'état de certains nous laisse perplexes car un tel délabrement témoigne d’une situation bien antérieure à la crise actuelle. 
Des chapelles et de belles maisons baroques aux façades souvent recouvertes d’azulejos jalonnent le parcours.
Portugal  Photo P Nicolas

Portugal  Photo P Nicolas
 Arrivés au Douro, nous achetons un billet unique pour visiter : un petit musée d’art sacré, les catacombes et une grande église gothique, Igreja de São Francisco, tous situés dans le même périmètre. Si le musée n’a rien d’exceptionnel, la grande salle située à l’étage vaut le déplacement car son plafond est magnifique.
Portugal  Photo P Nicolas

Sous le musée, les catacombes forment une curieuse enfilade de salles voûtées, le plus surprenant étant l’ossuaire que l’on découvre soudain, sous nos pieds, à travers une dalle de verre. Je m’imagine assez mal finir, ainsi, sous les pieds des touristes. 
Portugal  Photo B Nicolas
Au moment d'entrer dans l’Igreja de São Francisco, le gardien nous indique que les photos sont interdites. Dommage ! car l'intérieur est stupéfiant ; les murs disparaissent littéralement sous des talhas douradas, boiseries sculptées et dorées. Si l'on trouve ce type de boiseries dans beaucoup d'églises portugaises, elles montent, ici, jusqu'à la voûte, recouvrant même les piliers. 
Une telle profusion me met mal à l’aise ; l’œil ne sait où se poser. L'installation de ces talhas douradas a nécessité plus de 200 kilos d’or. Qu’est-ce qui a bien pu pousser les moines à cautionner pareil délire. Quand on sait que les Franciscains sont un ordre mendiant prêchant la pauvreté, le paradoxe est de taille !
Notre guide touristique indique que cette débauche a contraint les franciscains à fermer l’église au culte.
Il est difficile d’établir un parallèle entre cette vieille église et les immeubles abandonnés rencontrés auparavant, mais l’écart entre les deux est tout de même vertigineux.
Portugal  Photo P Nicolas
Le parvis surélevé de l’église domine le quai, offrant un large point de vue sur le Douro et sa rive gauche. De vieux bateaux aux lignes élégantes y naviguent. Affectés, il y a plus d’un siècle, au transport des fûts de Porto, ils sont reconvertis en bateau de promenade pour touristes. 
Une ligne de tram passe sur le quai au pied du parvis et l’un de ces vieux trams remis en service pour les touristes y stationne. 
Portugal Photo P Nicolas

Ces engins sont de si petite taille qu’ils m’évoquent des jouets de collection. Dévalant les collines de Porto ils passent parfois au ras des maisons pour la plus grande joie des vacanciers.

Quittant les bords du Douro, nous attaquons la colline de la cathédrale. Il fait si chaud que nous cherchons systématiquement l’ombre des ruelles. Juste au-dessous de l’esplanade entourant le monument, un petit belvédère offre une vue intéressante sur l’ouest de la ville. Nous essayons en vain de repérer l’auberge et nos fenêtres de chambre sur la colline d’en face. 

Romane à l’origine, la cathédrale a subi de multiples remaniements et n’a plus grand intérêt à part la rosace de sa façade. Du muret fermant l’esplanade s’offre un vaste panorama sur la ville. Une foule de touristes s’y prend en photo avec la ville en arrière-plan. Difficile d’approcher. 

Portugal Photo P Nicolas
Portugal Photo P Nicolas

Quittant ce lieu, nous gagnons la gare de São Bento réputée pour son hall tapissé d’azulejos. Absolument superbe ! Il règne, ici, une atmosphère sereine, tout à fait inhabituelle dans une gare.
Portugal  Photo P Nicolas
Nous en profitons pour acheter deux billets de train, Porto-Coimbra, trajet que nous effectuerons lundi matin. 
Alors qu’en France les billets sont assez larges et rigides, ceux que le guichetier nous remet ont la taille et la souplesse d'un ticket de caisse. 
Il est 13h00. De la gare São Bento, nous rentrons à l’auberge par le côté nord, évitant ainsi les ruelles pentues descendant au fleuve où les pavés inégaux sont mortels pour les chevilles quand on marche comme moi en sandales.

Après déjeuner nous descendons jusqu’à la place Ribeira au bord du Douro. Entre cette place et le pont Dom Luis, le Cais da Ribeira est une agréable voie piétonne d’environ 300 mètres où alternent terrasses de café et boutiques de souvenirs. Le quai prend des airs de marché avec ses stands colorés proposant les produits de l’artisanat local. Par cette chaleur les terrasses de cafés sont bondées. 
Portugal Photo P Nicolas
Un public hétérogène arpente le quai : touristes de tous âges, groupe de retraités en tenue de randonnée, jeunes vêtus de noir trimbalant guitares et percussions, enfants du quartier à la peau cuivrée se jetant dans le fleuve sous le regard amusé des touristes. Ambiance détendue, propice à la flânerie.

Projetant de visiter l’un des chais de vin de Porto, tous implantés rive gauche, nous traversons le pont Dom Luis. Avançant sur le passage piéton du tablier bas, je découvre au-dessus de nos têtes l’impressionnant assemblage de poutrelles métalliques formant l’arche du tablier haut. J’ai beau connaître la tour Eiffel, je suis très impressionné par cette masse métallique ; l’ouvrage parait si léger depuis le quai !
Portugal Photo P Nicolas
Le quartier de la rive gauche se nomme Vila Nova de Gaia. La promenade piétonne aménagée le long du Douro nous offre une très belle vue sur le centre-ville et ses maisons colorées à flanc de colline. De nombreux touristes se promènent le long de la berge ou partent sur le Douro dans l’un de ces vieux bateaux ayant servi au transport des fûts de Porto. Des rabatteurs nous proposent une promenade sur l’un de ces rabelos au pont décoré de quelques fûts en souvenir du passé.

N’ayant que l’embarras du choix pour visiter un chai, nous choisissons Ferreira. La prochaine visite en français étant dans 45 minutes, nous continuons notre ballade le long du fleuve jusqu’à un atelier de réparation et d’entretien des bateaux. 
Surprise ! un rabelos y est en construction. S’agirait-il de copies ? Observant avec plus d’attention ceux circulant sur le Douro je constate leur parfait état de conservation ; il s’agit bien de copies. L’idée de perpétuer le savoir-faire artisanal spécifique à la construction des rabelos en les destinant au tourisme m’apparait excellente.

Portugal Photo P Nicolas
La visite des caves Ferreira est intéressante et très instructive, malheureusement, il y fait si sombre que je ne peux y réaliser de photos satisfaisantes. Notre groupe se limitant à 5 personnes, le guide prend le temps de répondre à toutes nos questions. Nous apprenons, ainsi, que la zone de production du Porto ne se trouve pas autour de la ville mais dans la vallée du Haut Douro, près de la frontière espagnole. Le relief de cette région est tel qu’aucune mécanisation n’est possible sur les parcelles de vignes.

Portugal Photo P Nicolas

Autrefois, le meilleur moyen de transporter les fûts était d'utiliser ces fameux rabelos qui descendaient le Douro jusqu’à Vila Nova de Gaia. C’est ici qu’étaient et sont toujours rassemblées les sociétés de commercialisation du vin de Porto. 
Le jeune guide nous apprend également la principale caractéristique du Porto : il s’agit d’un vin muté. On interrompt brutalement sa fermentation naturelle en y ajoutant de l’alcool pur. Le vin ne peut plus évoluer mais conservera indéfiniment ses sucres résiduels. Le procédé date du XVIIIe siècle. Contrairement à ce que je pensais, une bouteille de Porto ne peut donc pas vieillir puisque toute vie y a été interrompue.
Portugal  Photo P Nicolas

Le Porto est issu à la fois d’un assemblage de divers cépages poussant dans la vallée du Haut Douro, et d’un savant mélange de plusieurs années. Certaines années exceptionnelles on réalise du Porto haut de gamme avec un assemblage issu de la même récolte voire d’une même parcelle. Ces bouteilles souvent millésimées sont rares. À côté, il existe trois sortes de Porto issus de récoltes d’années différentes :

  • Le porto blanc, généralement assez doux,
  • Le Ruby, assemblage de vins rouges ayant vieilli 3 à 5 ans en fût,
  • Le Tawny, assemblage de vins rouges ayant vieilli plus de 5 ans en fût.

La visite s’achève par la dégustation d’un Porto blanc, d’un Ruby et d’un Tawny. J’apprécie peu le blanc, j’aime mieux les deux rouges et bien qu’ils soient très différents, je n’arrive pas à décider lequel je préfère.

Revenant vers le pont Dom Luis, nous décidons de monter au jardim do morro surplombant les chais.
Plusieurs ruelles et escaliers en plein soleil grimpent vers ce jardin couronnant la colline. Après quelques difficultés pour trouver le bon chemin, nous arrivons au sommet en nage. Le vaste panorama sur le fleuve et la ville récompense notre effort.
Portugal Photo P Nicolas

Après une longue pause au Jardim do Morro, nous empruntons le tablier supérieur du pont Dom Luis pour rejoindre la rive droite. Traverser le Douro à cette hauteur est inoubliable. 
Rive droite, un funiculaire descendant la pente abrupte de la colline nous ramène en une minute à l’entrée du Cais da Ribeira.
Portugal  Photo P Nicolas

Portugal  Photo P Nicolas

Regagnant l’auberge, nous découvrons une intense animation dans les ruelles à flanc de colline ; les riverains préparent la fête de la Saint-Jean en accrochant des guirlandes en travers des rues. Sympathique effervescence ! 

Après dîner, ayant pris une consommation au Café Bilhares, Rua Avis, nous pensons à une erreur quand le serveur nous demande 1€15 pour une bière et un thé, mais non, c’est le juste prix et nous retrouverons tout au long du séjour ces prix étonnamment bas. 
Rentrant à l’auberge vers minuit, nous découvrons plusieurs Portugais ayant installé un stand devant la Torre dos Clérigos. Ils s'apprêtent à y passer la nuit, assis sur des chaises pliantes, enveloppés d’une couverture. Sans doute est-ce le seul moyen pour eux de ne pas perdre leur place.
Demain, selon la tradition de la São João (Saint-Jean), ils vendront des bottes très odorantes de fleurs de poireaux ou d’ail, que les habitants s’agiteront sous le nez en riant.




Dimanche 23 juin

Portugal  Photo B Nicolas
Aujourd’hui, nous nous rendons en bus au bord de l’océan et prévoyons de déjeuner au village de pêcheurs de Matosinhos
Malgré la nuit passée sur une chaise de leur stand, les marchands sont déjà au travail lorsque nous longeons la Torre dos Clérigos. Aux étals, les bottes de fleurs d’ail et de poireaux sont alignées entre de gros sacs en plastique renfermant le second accessoire indispensable à la fête : le marteau multicolore en plastique mou.

La rua dos Clérigos descend vers la Praça da Liberdade, probablement la plus grande place de Porto d'où part le bus 500 desservant le littoral atlantique.
Portugal  Photo P Nicolas
Les arrêts entre le centre-ville et l’estuaire du Douro sont nombreux mais courts, notre bus rejoint rapidement le littoral.
Une partie du boulevard de mer ayant été fermée en raison d’une course de voitures anciennes, le chauffeur ne peut aller jusqu'à son terminus et nous dépose sur le front de mer. Très bien ! Il fait si beau.
Tous les aménagements du littoral paraissent neufs. Des arbres de petite taille sont plantés sur la promenade et un terrain gazonné parfaitement entretenu descend doucement vers la mer, rejoignant une piste pour piétons et cyclistes. Nous l'empruntons. Il fait chaud mais un vent frais venant du large rend cette chaleur supportable (nous ne découvrirons nos coups de soleil qu’en soirée !) 
Sous ce soleil, l’écume des vagues, d’un blanc brillant, surligne la découpe de la côte rocheuse.
Portugal  Photo P Nicolas
Au bout de la piste, nous rejoignons la route avant un rond-point cerné de gradins. La course doit passer devant car des rugissements de moteurs accompagnés d’odeurs de carburant nous parviennent.
Une fois ce rond-point dépassé, nous atteignons une longue plage dont le sable blanc, extrêmement fin, renvoie violemment la lumière.
Il y a peu de baigneurs. Quelques personnes bronzent allongées sur des nattes, se protégeant du vent par des toiles maintenues à l’aide de piquets enfoncés dans le sable. 
Ici, la promenade n’est plus qu’une interminable dalle de béton, ouverte aux piétons, vélos et rollers. De l’autre côté de la route, des immeubles sans caractère accentuent la froideur du lieu. Vivre ici toute l’année doit être déprimant.


Portugal  Photo P Nicolas

Portugal  Photo P Nicolas
Portugal  Photo P Nicolas
Le village de Matosinhos débute à l’extrémité de cette longue plage où un ensemble de sculptures en bronze, massives et très réalistes, représente cinq femmes de marins scrutant la mer, visage déchiré par la douleur. Impuissantes, elles assistent au naufrage d’un des leurs. La présente de cette oeuvre témoigne du lourd tribut payé par Matosinhos à la mer.

Nous déambulons dans les rues du village à la recherche d’un de ces petits restaurants de pêcheurs dont nous avons entendu parler à l’auberge. Modestes, disposant de peu de tables, ils sont vite pleins. N’ayant que l’embarras du choix, nous choisissons la terrasse de O Vila Verde, dans la rua Sul, tout près du port.
Portugal  Photo P Nicolas
Portugal  Photo P Nicolas
Cadre familial, ambiance pittoresque, tables et chaises dépareillées, cuisine simple. La carte propose essentiellement des poissons grillés pêchés la veille. Les deux serveurs (enfants de la famille ?) sont aux petits soins pour leurs clients. La dorade est succulente.

Au retour, l’attente à l’arrêt de bus est longue ; il n'y a aucun abri et la température dépasse les 30°. Le bus 500 arrive enfin. 
Dans Porto, les rues commencent à se remplir de monde, on se poursuit déjà, armé d'un de ces marteaux en plastique creux émettant un couic aigu à chaque coup asséné. Ce son aigu retentit partout sur les trottoirs du centre-ville.
Portugal  Photo P Nicolas
Lorsque nous remontons à l’auberge, beaucoup d'habitants du quartier sont aussi dans la rue. Certains discutent en surveillant leur barbecue, d'autres entreprennent de caler leur table de salle à manger entre les voitures pour le dîner du soir. Vin et bière circulent généreusement, une odeur de sardines fraîches, grillées, flotte dans l’air. Près de l’auberge, tous les voisins installent leurs tables bout à bout. Une sono est installée le long de l’immeuble.
Portugal  Photo P Nicolas
Portugal  Photo P Nicolas
Portugal  Photo P Nicolas
Portugal  Photo P Nicolas

Nous fêtons la Saint-Jean à l’auberge où un dîner est prévu dans le jardin. Il fait presque nuit quand les pensionnaires s’y rassemblent autour d’une sangria. Beaucoup de jeunes et quelques-uns, moins jeunes, de divers pays : Australie, Espagne, Sicile, Irlande, nous sommes les seuls Français.
Malgré notre faiblesse en langues étrangères nous échangeons un peu avec une étudiante sicilienne et une Irlandaise d’âge mûr. Tous nous disent admirer le système de santé français. 
Comme le veut la coutume, à minuit, les habitants lancent de mini montgolfières éclairées d’une petite bougie. Cela effraie les oiseaux de mer nichant sur les toits mais quel spectacle quand le ciel de la ville se remplit de mini montgolfières ! 
Puis c’est le grand feu d’artifice au-dessus du Douro. Remontés à notre chambre pour le suivre de nos fenêtres, nous sommes aux premières loges !
Portugal  Photo P Nicolas

Portugal  Photo P Nicolas




Lundi 24 juin

Portugal  Photo B Nicolas

Prenant le train pour Coimbra à 09h00, nous sommes prêts de bonne heure.
Une surprise nous attend en descendant prendre notre petit déjeuner ! Nus dans l'espace cuisine/salon, deux jeunes font l’amour. Les violents coups de reins du garçon prouvent qu’il tient une forme éblouissante après cette nuit de fête. Bravo ! 
N'ayant pas le coeur de les interrompre, nous filons déjeuner au bâtiment principal de l’auberge où existe aussi un espace cuisine/salon. 

Nous voilà partis en tirant nos valises, il n'y a pas un chat dehors et nous constatons que la fête a dû se terminer tôt ce matin car le désordre est indescriptible dans les rues autour de l'auberge : tables non débarrassées, nappes souillées, bouteilles entamées abandonnées, chaises renversées, le sol est jonché de papiers et de gobelets en plastique. 
Portugal  Photo B Nicolas
Un vent frais nous enveloppe lorsque nous débouchons rua dos Clérigos. Ce courant d'air entraîne des cannettes de bière vides qui heurtent les pavés en produisant un bruit sinistre. Quelqu'un a oublié son marteau plastique sur une marche de la tour. Sur les seuils de magasins s’entassent restes de repas et bouteilles entamées. Une femme âgée, tête enveloppée d’un foulard et munie d’un bâton, remue les déchets à la recherche de nourriture. Elle ramasse un cornet de frites à peine entamé. 

Juste avant la Praça da Liberdade, des jeunes ivres se battent. Nous nous arrêtons, préférant attendre de voir comment les choses vont tourner. Une jeune fille voulant séparer deux garçons reçoit un violent coup de poing dans la figure et s’écroule sur le dos, sonnée. Il lui faudra plusieurs secondes pour retrouver ses esprits. Finalement, elle n'est pas blessée car elle se relève en hurlant après eux. La bagarre s’interrompt, deux des jeunes quittent le groupe en injuriant les autres. L’un de ceux qui restent a la bouche en sang.
Portugal  Photo B Nicolas
Arrivés à la gare de São Bento, le hall et les quais sont remplis de jeunes fêtards attendant l’une des navettes pour rentrer chez eux. Certains ont encore un gobelet de bière à la main, tandis que d’autres luttent contre le sommeil assis à même le sol du hall, des quais, ou écroulés sur les sièges de la navette qui nous conduit à Campanhã.
L’ambiance change radicalement à la gare Campanhã où passent les grandes lignes ferroviaires. Ici, les quais sont déserts. Les rares personnes que nous croisons ne reviennent pas de la fête ; sac sur le dos, ils partent au travail.

Le train arrive et repart à l’heure. Il traverse le Douro à proximité de l’autre pont métallique identique au viaduc de Garabit. Après un bref arrêt, rive gauche, à Villa Nova de Gaia il rejoint la côte avant de descendre plein sud. Au moins deux autres couples français sont montés dans notre compartiment. Les sièges sont confortables.
Nous apercevons la côte bordée de plage et de résidences secondaires. Des passerelles de bois, aménagées au-dessus du sable, permettent aux piétons et cyclistes de circuler d’un îlot à l’autre.
Le train s’éloigne de la côte. Il ne s’arrête qu’à deux ou trois reprises et rejoint Coimbra en une heure trente. Comme à Porto, c’est en navette que nous rejoignons le centre-ville.


Portugal.  Photo B Nicolas
Située à 125 kilomètres au sud de Porto, Coimbra dépasse les 140 000 habitants et s’étend sur les deux rives du Mondego. La ville abrite la plus ancienne université du pays. Il fait plus chaud ici qu’à Porto. Coimbra se situant à environ 50 kilomètres de la côte, nous ne profitons plus du petit vent rafraîchissant venu de l’océan.
Une fois nos bagages déposés à l’hôtel, nous découvrons un quartier pittoresque aux ruelles étroites, assez sombres, dans lesquelles de nombreux commerces n’ont aucune vitrine. 
Portugal  Photo B Nicolas
Leurs portes sont ouvertes, mais il faut écarter les lanières des rideaux anti mouches pour découvrir quels produits sont vendus à l’intérieur. Les commerces de fruits et légumes se repèrent plus facilement, tous ayant de petits étalages à l’extérieur. Ici aussi on a fêté la Saint-Jean, les guirlandes sont encore tendues au-dessus de nos têtes.
Nous achetons des fruits, un fromage local et une bouteille d’eau fraîche puis nous allons piqueniquer dans un parc ombragé, en bordure du Mondego.

Malgré la forte chaleur, nous partons vers 13h00 visiter la ville et commençons par Sé Velha
En portugais "" signifie "cathédrale". Sé Velha est considérée comme la seconde cathédrale romane la plus ancienne du pays après Braga dans le nord. Alors que cette dernière mélange roman, gothique, et baroque, Sé Velha présente un ensemble roman très homogène. 
Portugal  Photot P Nicolas
Portugal  Photot P Nicolas

Cernée de maisons anciennes, ne disposant que d’une toute petite place en pente devant le parvis, la façade est d'autant plus difficile à photographier que les voitures stationnent le long du bâtiment. Ayant réussi à prendre quelques clichés, nous poursuivons sous une chaleur torride en direction de l'université à laquelle nous accédons par une porte majestueuse la Porta Férrea  (la porte de fer)
Portugal Photo P Nicolas

Portugal  Photo B Nicolas
Portugal  Photo B Nicolas
Celle-ci franchie, nous débouchons sur une cour immense flanquée de bâtiments sur trois côtés. Le site est grandiose. Curieusement, l’université se visite même en période d’examens, c’est le cas aujourd’hui. Tête plongée dans leurs feuilles de cours, de nombreux étudiants révisent devant diverses portes en attendant de passer l’oral. 
Empruntant un long couloir bordé de fenêtres, nous apercevons une salle dans laquelle un étudiant passe son oral, face à trois professeurs. Il illustre son propos par des slides grâce à un petit rétroprojecteur, tandis qu'assis à l’écart, quatre étudiants suivent attentivement la prestation de leur camarade.
Malgré la chaleur, certains étudiants portent la tenue de l’université, une longue cape noire, identique pour garçons et filles. L’université de Coimbra accueille près de 20 000 étudiants.


Portugal  Photo B Nicolas
On ne pénètre qu’à tour de rôle dans l’ancienne bibliothèque et le guide nous apprend que chaque soir, le sol et les longues tables sont recouverts de tissu pour protéger la pièce des déjections de chauves-souris. Maintenues volontairement dans la bibliothèque elles mangent les insectes qui sinon s’attaqueraient aux livres. Et cela fonctionne. Vive les chiroptères ! Si ma cave était moins humide, je pourrais y descendre mes livres puisqu'elle héberge trois pipistrelles.
En soirée, nous dînons au restaurant du Jardim da Manga face à une très curieuse fontaine à baldaquin.

Portugal  Photo B Nicolas



Mardi 25 juin


Portugal  Photo P Nicolas
Après une excellente nuit, nous déjeunons Praça 8 de maio dans le superbe café baroque café Santa Cruz, accolé à l'église du même nom. Occupant une partie du monastère Santa Cruz, ce café possède une vaste salle voûtée de style manuélin ainsi que de magnifiques boiseries.
Portugal  Photo P Nicolas
Aujourd'hui, nous partons en voyage itinérant à travers le centre du pays, périple qui s'achèvera à Lisbonne dimanche prochain, 30 juin.
L’agence où nous avons retenu la voiture étant loin de l’hôtel, nous y allons en taxi. Le chauffeur est un retraité parlant français qui nous confie avoir travaillé à Paris puis à Tours durant 25 ans. Sa faible retraite l’oblige malheureusement à faire le taxi pour compléter ses revenus. 
Je ne suis pas le seul dans ce cas,vous savez ! Beaucoup de retraités font comme moi.

L'agence Europcar occupe l'une des boutiques de l'enceinte extérieure du stade de Coimbra. Scotché à la porte vitrée, un papier nous informe que le gérant revient de suite. Espérons, car il n’y a ni ombre ni banc et un panneau électronique affiche une température de 40°. 
Le gérant arrive, les formalités sont rapides et nous voilà partis. Quel bonheur d'avoir la clim !

Allant vers l’est, nous devons traverser une zone montagneuse. La route des crêtes nous tente. Elle est bordée de vert sur la carte et débute juste à la sortie d’une petite agglomération nommée Lousa. Je ne suis pas prêt d’oublier ce nom ! 
Portugal  Photo B Nicolas

Nous tournons près de 45 min dans Lousa, empruntant successivement chaque sortie sans jamais trouver la route des crêtes. Déçus nous suivons la vallée en direction de Tomar, notre prochaine étape.

La clim étant réglée sur 20° depuis ce matin c’est une fournaise qui nous cueille en sortant de voiture devant l'hôtel Trovador à Tomar. Heureusement, il suffit de traverser la rue et pousser la porte d’hôtel pour retrouver aussitôt la fraîcheur. 
Au comptoir, un quadragénaire aux cheveux frisés grisonnants nous accueille dans un français plus que correct. Derrière lui, trois pendules rondes alignées sur le mur affichent chacune un fuseau horaire différent : Lisbonne, Paris, New York.
Notre chambre est située au bout d’un long couloir au second étage ; décor banal, stéréotypé. Les bagages une fois rangés nous partons découvrir la vieille ville toute proche construite entre le pied d’une colline et la rivière Nabão
Portugal  Photo B Nicolas
Portugal  Photo B Nicolas


Portugal  Photo B Nicolas
À quinze heures, la vieille ville est totalement déserte, excepté quelques touristes peinant, comme nous, sous le soleil. La chaleur que renvoie le pavage nous fait respirer un air brulant. Au bout de la rue, un bandeau lumineux affiche une température de 42°. La boisson que nous prenons dans un café de la Praça da Républica nous rafraîchit mais nous fait transpirer plus encore. 
Reposés, nous décidons quand même de visiter l’Igréja de Santa Maria do Olival. Cette église qui appartenait aux templiers et où étaient enterrés les chevaliers est construite sur l’autre rive de la rivière Nabão, loin de la forteresse surplombant la vieille ville.
Nous y accédons par une passerelle franchissant la rivière à côté de l’un des principaux ponts de la ville. Contrairement à son apparence, l’Igréja de Santa Maria do Olival n’est pas de style roman mais gothique primitif. Nous apprécions autant son volume équilibré à l’extérieur que son décor d'azulejos à l’intérieur. Pour une raison que nous saisissons mal, le gardien ferme plus tôt que d’habitude, il nous met dehors au bout de trois minutes.

Portugal  Photo P Nicolas
Portugal  Photo P Nicolas
Cherchant, en soirée, un lieu où goûter la cuisine locale, nous découvrons une maison sans enseigne ayant un menu affiché à l'extérieur. Malgré les rideaux, nous devinons quelques tables dressées à l'intérieur et entrons. Il s'agit bien d'un restaurant. Deux clients dînent dans une pièce communiquant directement avec la salle à manger du propriétaire où les enfants sont assis autour d'une table.

Ravi de pouvoir parler français, le patron nous installe puis nous explique la composition des plats en cherchant un peu ses mots. Comme il n’emploie pas toujours le terme adéquat, le résultat est cocasse. Il nous sert de bons plats traditionnels et ses efforts pour s'exprimer en français sont touchants.

Placée en évidence dans la pièce, une haute couronne nous intrigue. Elle semble composée de petits pains et de fleurs dont le dessèchement prouve qu'elle trône, là, depuis des mois. Demandant au patron ce qu’elle représente, celui-ci nous répond avec fierté qu'il s'agit de la coiffe portée par sa fille à la Festa dos tabuleiros (fête des plateaux).
« C’est l’une des fêtes les plus réputées du Portugal ; elle se déroule tous les 4 ans pendant plusieurs jours et attire des milliers de Portugais et d’étrangers. 400 à 500 000 personnes viennent à notre fête alors que la ville compte seulement 40 000 habitants.
Nos rues et nos maisons sont entièrement décorées de guirlandes de fleurs, c’est magnifique ! Et la fête se termine par le grand défilé des plateaux où plusieurs centaines de jeunes filles vêtues de blanc portent cette coiffe composée de pains et de fleurs assemblés sur un plateau. La hauteur de la coiffe doit correspondre exactement à la taille de la jeune fille qui la porte ! C’est la règle »

Bien qu'il fasse nuit, l’air est encore tiède lorsque nous ressortons. Déserte à notre arrivée, la Praça da Républica attire le monde après dîner. Son éclairage orangé met en valeur les bâtiments alentours. Assis dos à la mairie, nous observons des enfants jouer au ballon devant l’église Saint-Jean Baptiste. Les habitants sont sortis des maisons et discutent par petits groupes ici et là. L'ambiance régnant ici, paisible, si agréable, fait que nous y restons un long moment.




Mercredi 26 juin 2013

Portugal  Photo P Nicolas
Ce matin, nous allons visiter l’un des plus importants monuments du Portugal, la forteresse de L’Ordre du Christ. Quartier général des templiers au Moyen-Age, elle est classée au patrimoine mondial de l’UNESCO.
La température bat déjà des records lorsque nous pénétrons à 09h00 sur le parking de la forteresse en haut de la colline. Il est aisé d'y trouver une place à l’ombre car seulement trois voitures y stationnent. Je m’attendais à rencontrer plus de monde dans un lieu aussi réputé.
Portugal  Photo P Nicolas
La longue muraille ceinturant le site est impressionnante. Nous accédons à la porte principale par un goulet encaissé qui m'évoquerait une souricière si le porche n'était grand ouvert. Devant ces murailles massives, j'éprouve une sensation de force austère empreinte de sérénité. 
Comment était la vie, ici, au XIe siècle ?... Dure et intransigeante, sans doute. Difficile de l’imaginer aujourd’hui quand l’imagerie du moyen-âge, surexploitée par nos médias, est détournée, fantasmée.
Portugal  Photo P Nicolas

À la fois garnison et couvent, la forteresse a été fondée en l’an 1118 par des chevaliers français afin de surveiller la route de la Terre Sainte qu’empruntait les pèlerins. La construction du château a commencé en 1160. Les Maures qui l’ont attaqué en 1190 s’y sont cassé les dents.

Se retrouver sans guide dans un tel lieu est assez déroutant, mais partir à sa découverte plutôt excitant. Nous ne rencontrerons pas plus de six ou sept personnes dans ce dédale de salles et de cloîtres au cours de la matinée. Difficile d'imaginer qu'il fourmillait de moines-soldats!


Portugal  Photo P Nicolas
Plusieurs cloîtres se succèdent au même niveau ; certains communiquent avec l’étage supérieur par d'étroites tourelles aux escaliers presque invisibles. Au bout de 30 minutes, nous sommes incapables de déterminer à quel niveau et de quel côté du site nous nous trouvons. Heureusement qu’un plan nous a été remis à la billetterie.

L’architecture de cette forteresse est tantôt sobre tantôt raffinée. De ne jamais nous être retrouvés seuls dans un monument aussi vaste produit sur nous un effet étrange. Cette succession de salles, de cloîtres, de couloirs, tous silencieux, nous donne, d'une part, l'impression d'un monument encore plus vaste, d'autre part, le sentiment de déambuler dans un lieu oublié, perdu, à l'écart du temps. 
Chaque couloir, chaque escalier, nous conduit à un lieu ayant son caractère propre. Et ce lieu possède souvent plusieurs sorties : vers le haut, vers le bas, à gauche, à droite… Ne surtout pas perdre le plan !
Portugal  Photo P Nicolas
Portugal  Photo P Nicolas
Portugal  Photo P Nicolas
Au milieu du couvent, la curieuse et magnifique rotonde des templiers, richement décorée, possède un axe central composé de plusieurs colonnes hautes de deux étages. On peut faire le tour de cet axe remarquablement agencé et superbement décoré. Une coupole recouvre l’ensemble. 
Dans l’église adjacente, les moulures des voûtes forment d'élégantes arabesques. « Arabesque » convient parfaitement puisqu’ici, art Arabe et Européen sont indissociables.

Portugal  Photo P Nicolas
Portugal  Photo P Nicolas
L’un des nombreux escaliers en colimaçon empruntés nous conduit à une longue terrasse, légèrement en pente servant de toit aux cloîtres du dessous. Un panneau indique que les moines-soldats y produisaient du miel.
Rejoignant le premier niveau, je me demande si des films ont déjà été tournés dans la forteressee et imagine une fiction dont l'intrigue, à l'image du monument offrirait plusieurs options de cheminement.
Portugal  Photo  P Nicolas
Portugal  Photo  B Nicolas

Nous ressortons, autant séduits par l’aspect insolite de la visite que par la puissance architecturale de l'ensemble. Cette visite restera notre souvenir le plus marquant du voyage.




Nous avons repris la route en direction d’Alagoa, bourgade proche de la frontière espagnole où nous passerons trois nuits. Au Portugal, rouler vers l’est ne dure jamais longtemps puisque seuls 200 kilomètres séparent la côte atlantique de la frontière espagnole.
Portugal  Photo P Nicolas
Portugal  Photo P Nicolas
Le trajet est agréable, pittoresque, assez accidenté. Nous ne croisons aucun touriste, mais un grand nombre de cigognes nichant un peu partout : sur les poteaux électriques en bordure de route, dans les arbres, sur les toits, les cheminées. Elles devraient bientôt partir en migration vers des zones moins chaudes.

 Les prairies sont parsemées de chênes-lièges sous lesquels des troupeaux de bovins s’abritent du soleil. Par endroits, la terre est rouge. Plus nous approchons du bourg d’Alagoa, plus le sol est rocailleux. Dans certains champs, de gros blocs de pierre sortent un peu partout du sol, dans d’autres de grandes dalles sombres masquent totalement la terre. Seuls des moutons peuvent paître sur des sols aussi arides.

Un kilomètre avant Alagoa, un panneau nous indique l’entrée du gîte Quinta Paraiso.
Il est 16h30. La frontière espagnole est à moins de trente kilomètres.
Portugal  Photo P Nicolas
Notre hôte, un quinquagénaire aux cheveux grisonnants, Antonio Cardona Casanova, arbore un look soixante-huitard et parle couramment le français.
Son gîte se compose de trois bâtiments de plain-pied formant un « U » autour d’un patio rectangulaire. Au fond, le plus petit bâtiment, avec véranda, fait office de cuisine-salle à manger. Les deux ailes en retour abritent, l’un le domicile du propriétaire, l’autre les quatre chambres du gîte. 
Antonio nous montre notre chambre, une pièce assez grande avec salle de bains et toilettes. La fenêtre donne sur le patio au centre duquel un bassin abrite quelques tortues.
Une fois installés, nous poussons jusqu’au village d’Alagoa, bourgade paisible de 600 habitants.


Portugal  Photo P Nicolas
Portugal  Photo B Nicolas
Portugal  Photo B Nicolas
Fraîchement repeinte, l’église se repère immédiatement à l'angle de la place du village. Dans la rue pavée partant de là, les ouvertures de certaines maisons, aux crépis également récents, sont peintes de couleurs vives. Nous croisons quelques habitants ; tout est si calme !
De retour au gîte, nous buvons un verre d'eau bien fraîche assis à une table du patio. Le propriétaire nous apprend alors qu'un restaurant d'Alagoa sert une bonne cuisine à un prix raisonnable ! Ici, tous les prix semblent raisonnables. N’ayant pas le courage de reprendre la voiture, nous dînons des restes du piquenique de ce midi.
Tandis que nous mangeons, un couple belge rentre de promenade et nous salue en français. Antonio nous expliquera un peu plus tard qu'ils viennent chez lui chaque année et sont devenus amis.

S’il y a un peu d’air sur la terrasse, la chaleur suffocante dans notre chambre nous incite à allumer la clim. Celle-ci fonctionnant au même rythme que l’économie du pays, nous devons ouvrir la fenêtre au milieu de la nuit pour avoir un peu d’air !




Jeudi 27 juin 2013


Portugal  Photo P Nicolas
Aujourd'hui, notre objectif est de visiter rapidement la ville de Portalegre où nous ferons quelques courses avant de grimper aux villages fortifiés de, Marvão et Castelo de vide, tous deux perchés à plus de 800 m d’altitude. 
Au petit déjeuner, le couple belge et le propriétaire nous recommandent vivement la visite de ces villages de montagne.

Situé à 15 km du gîte et perché sur un éperon rocheux, Portalegre est un gros bourg, également fortifié, surplombant une longue vallée que traverse l’axe routier conduisant en Espagne. Une montée sinueuse accède au centre-ville, lequel ne conserve que peu de traces des anciennes fortifications.
Portugal  Photo B Nicolas

Portugal  Photo B Nicolas
Depuis l’étage du centre culturel, le panorama sur la campagne alentour est superbe. Dommage qu’il soit en grande partie masqué par des poutrelles en bois.

Alors que nous marchons dans une rue de la vieille ville, quelqu’un sort d’une maison, chargé de sacs de provisions. La maison n’a ni vitrine ni enseigne, mais nous devinons qu’une épicerie se trouve derrière la toile bleue masquant l’entrée. Nous entrons.
L'intérieur fait penser à une arrière-boutique où une remise, il y fait sombre. Des cagots de fruits et légumes étant posés sur le sol de ciment, nous remplissons deux pochons de fruits et les tendons à l’homme âgé appuyé au comptoir. La balance sur laquelle il les pèse semble aussi âgée que lui.
Sur les étagères, derrière lui, sont alignés sans aucun rangement : conserves, papier toilette, boites de cirage, produit anti-mouches, dentifrice, sacs de riz et haricots, ainsi qu'une série de bocaux où des plantes macèrent dans l'huile d'olive.
Portugal  Photo B Nicolas
Ayant repris la voiture, nous tournons en rond un bon moment dans le haut de Portalegre avant de trouver la route des villages fortifiés. Depuis notre arrivée il y a 7 jours, le temps ne change pas, il fait toujours aussi beau.
Portugal  Photo P Nicolas
Les fortifications de Marvão nous apparaissent au détour d’un virage. Vues du dessous, elles se confondent presque avec l’éperon rocheux.
À l’entrée du village, le porche de la première enceinte est immédiatement suivi d’un second porche, plus petit, et d'une seconde enceinte précédant le village. Comme à la forteresse de Tomar, nous ne rencontrons quasiment aucun touriste sur place. Le haut Alenjejo serait-il méconnu malgré ses richesses ?
Portugal  Photo P Nicolas
Portugal  Photo B Nicolas
Portugal  Photo B Nicolas
Portugal  Photo P Nicolas
Portugal  Photo B Nicolas
Depuis le chemin de ronde des fortifications, le panorama s'étend à l'infini. L'horizon se brouille en raison de la chaleur.
Au-delà du village, une troisième enceinte protège l’accès au château dans lequel une quatrième enceinte isole le donjon et les appartements du seigneur. Cette succession d’enceintes en dit long sur l’insécurité de la région à l’époque. Depuis les murailles du donjon, c’est l’Espagne que l’on voit quelques kilomètres plus loin.

Portugal  Photo B Nicolas
Portugal  Photo P Nicolas


Reprenant la route, nous poursuivons en direction de Castelo de vide. Beaucoup plus important que Marvão, ce village fortifié conserve lui aussi les ruines de son château et du donjon. Il a longtemps été une station thermale appréciée des Romains autant que des Arabes.
Bien que nous soyons à environ 800 m d'altitude, il n’y a pas le moindre souffle d’air ; la chaleur devient si forte que nous nous réfugions dans un bar où la clim nous rafraîchit un peu. Je ne serais pas surpris que le thermomètre dépasse les 40°.


Portugal  Photo B Nicolas
Une fois à l'intérieur du château, nous devons grimper sur le toit d’une ancienne poudrière et le traverser pour accéder au donjon. S'il ne reste pas grand chose à l'intérieur, la vue est en revanche, magnifique. Assis sur un banc de pierre devant une ouverture, nous découvrons la topographie du village en contrebas et le vaste panorama environnant. 
Quelle bénédiction, ce petit courant d'air dû aux multiples ouvertures !
Portugal  Photo P Nicolas
Dans la partie la plus ancienne du village existe une très ancienne synagogue aménagée en musée. Nous y apprenons que des juifs, chassés d’Espagne, sont arrivés à Castelo de Vide en 1492. Cette synagogue serait la plus ancienne du Portugal.
La pâtisserie du village est réputée pour ses queijadas. Élaborée à partir de lait caillé, cette spécialité est vendue nature, aux amandes ou à l’orange. Excellent.

Portugal  Photo B Nicolas
Portugal  Photo B Nicolas
Portugal  Photo P Nicolas

Sur le retour, nous empruntons un itinéraire secondaire débouchant à proximité du gîte. La route est étroite, peu entretenue, bordée de champs où affleure cette roche sombre, omniprésente dans la région, qui donne au paysage un aspect sévère. La route étant déserte, nous nous arrêtons fréquemment prendre des photos. Derrière le total dépaysement que procure cet espace minéral, perce une atmosphère pesante.
Portugal  Photo P Nicolas

Portugal  Photo B nicolas

Suivant les conseils du propriétaire nous allons dîner chez Horacio à Alagoa. Le café restaurant se situant juste avant la place du village, nous laissons la voiture sur la place.
La salle du café est vide et silencieuse. Puis un homme,sans doute le propriétaire, sort des cuisines. Il ne parle pas un mot de français mais comprend à nos mimiques que nous souhaitons dîner et nous dirige vers une salle indépendante, derrière le bar. Le restaurant est équipée de longues tables avec des bancs. Nous sommes les seuls clients. 
Allumée au fond de la pièce, la télévision diffuse le journal du soir. Il est bien sûr question de la grève générale prévue aujourd'hui et nous comprenons que deux ministres portugais viennent de démissionner. 
C'est alors que le couple belge entre et s'installe à la table voisine. Venant souvent dîner ici, ils nous conseillent certains plats. La cuisine est vraiment bonne et copieuse, trop copieuse par cette chaleur. Quant au prix, toujours imbattable. Nous reviendrons demain soir.                  
Portugal  Photo B Nicolas
Assis dans le patio du gîte, nous discutons avec le propriétaire tout en buvant un verre de Ginja (cerise à l'eau de vie) faite maison. Nous parlons de la grève générale et il nous confie que la gravité de la crise économique portugaise a des conséquences directes sur son activité d’hébergement. Contrairement aux années précédentes, il n’a aucune réservation pour les prochaines semaines et ignore comment il va faire face à la situation. Haussant les épaules avec un geste d’agacement il nous dit qu’au Portugal les politiques peuvent faire ce qu’ils veulent puisque les gens ne bougent pas. 
Le portugais est trop gentil, il accepte toujours tout 
Il ajoute qu'en 1974, la révolution des œillets a vu toute la population dans la rue, mais qu'elle a été la première révolution pacifique en Europe. 
C’est normal les Portugais sont si gentils !




Vendredi 28 juin 2013


Portugal  Photo P Nicolas

Déjà 8 jours de passés !
La clim de notre chambre prolongeant son soutien à la grève générale, nous avons dormi dans une serre. 
Le gîte se trouve à l’entrée du Parque Serra de Sao Mamede, un parc naturel dépassant les 30 000 hectares et allant jusqu’à la frontière espagnole. Aujourd'hui, nous prévoyons une journée nature : balade à pied, observation d’oiseaux (éventuellement), et montée au point culminant de la région, le pic Sao Mamede.

Quitter Alagoa par de petites routes pittoresques nous procure un total dépaysement. Pas un chat, comme d'habitude.


Portugal  Photo P Nicolas
Ces itinéraires secondaires totalement déserts nous donnent l’impression que le pays est vide. Je sais que la plupart des vacanciers sont sur les plages de l'Algarve, au sud, mais quand même ! Roulant tout doucement pour observer le paysage, il nous arrive de nous arrêter au milieu de la route et de descendre prendre des photos sans crainte de gêner qui que ce soit.

Portugal  Photo P Niccolas
Ici, la plupart des champs sont entourés de simples murs à pierres sèches. Nous en rencontrons de plus élaborés où les moellons sont entassés entre des blocs verticaux. 
Un détail nous surprend : de nombreux champs possèdent un portail, un portail identique à ceux d’une entrée de cour ou de jardin sauf qu’il n’y a aucune habitation derrière, seulement le champ. Après recherches, je n’ai trouvé aucune explication à l’existence de ces portails tantôt bien entretenus, tantôt inutilisés et envahis d’herbe.
Portugal  Photo P Nicolas
Nous poursuivons notre route jusqu’à un lac artificiel situé une douzaine de kilomètres au-dessus de Castelo de vide. Le barrage de Póvoa, au nord du lac, provoque cette retenue, toute en méandres et ramifications, qui donne l'illusion que plusieurs plans d’eau se succèdent. Empruntant un chemin de terre, nous marchons le long de cette rive tourmentée. Le site est calme, très agréable. Dois-je préciser qu'il n'y a aucun touriste à l’horizon ?
Portugal  Photo P Nicolas
Portugal  Photo P Nicolas
Au niveau du barrage nous découvrons d'énormes eucalyptus dans lesquels nichent plusieurs cigognes.

À présent, la petite route que nous suivons franchit une rivière où deux ponts se côtoient. Le plus ancien est fermé à la circulation, mais n’a pas été démonté. Le second, à peine plus large, a été construit à côté. Nous descendons piqueniquer au bord de la rivière dont l’eau est d’une grande limpidité.  Ensuite, nous observons les oiseaux vivant sur les berges : cigognes blanches, héron pourpre, hirondelles des rochers… et deux rapaces que nous n’avons pu identifier. Au cours de cet arrêt d' 1h30, une seule voiture est passée sur le pont.


Portugal  Photo B Nicolas
En remontant à la voiture, nous découvrons quelques échassiers aux plumes blanches et au poitrail orangé. Se faufilant entre les pattes d'un troupeau de bovins, ils les débarrassent de leurs parasites à coups de bec rapides. Ce sont des hérons garde-bœufs. Bien qu’il s’agisse d’une espèce assez courante, en France, nous n'en avions jamais observé.

La route très sinueuse que nous suivons maintenant grimpe à un sommet où s’élève une minuscule chapelle. Celle-ci est fermée mais nous sommes venus profiter de la vue plongeante sur Castelo de Vide, visité hier. Ses vieilles fortifications et le développement ultérieur sont bien visibles. La partie fortifiée parait si petite comparée à l’extension moderne. 
Surprise ! Nous croisons enfin trois humains en repartant : une femme et deux enfants grimpant à la chapelle.


Portugal  Photo P Nicolas
Arrivés au cœur du parc naturel, nous voulons grimper au pic de Saô Mamede, haut de 1027 mètres et situé à environ 5 kilomètres de la frontière espagnole. À son pied, la route qui semble y monter est une piste de terre. Aucun panneau n’indiquant la direction du sommet, nous hésitons avant de nous y lancer. Le chemin n’est pas trop abîmé, mais contourne le pied du mont sur plusieurs kilomètres avant d’y grimper. Nous ne croisons personne sur la piste et pas davantage au sommet. L’absence de végétation nous offre une vue panoramique à plus de 180° sur la région. 
Je remarque avec intérêt la coloration très vive de certaines roches du pic.
Il fait si bon au-dessus de 1000 mètres que nous restons un bon moment assis à contempler le paysage.

Portugal  Photo P Nicolas

Portugal  Photo P Nicolas
Portugal  Photo P Nicolas
Nous rejoignons Portalegre, traversons la E802 et filons jusqu’au village Flor da Rosa dont l’église est signalée dans notre guide. 
L’extérieur du bâtiment évoque plus une forteresse qu’un lieu de culte, mais à l’époque la frontière était si peu sûre…
Bien qu’une partie du site soit transformée en Poussada (hôtel de luxe), nous pouvons quand même en visiter la majeure partie. Cette fois, nous ne sommes pas seuls, un autre couple effectue la visite. 


Portugal  Photo B Nicolas
Portugal  Photo B Nicolas
Portugal  Photo B Nicolas
L’église n’est plus affectée au culte, elle a été aménagée en musée et accueille, entre autres, une exposition de vierges à l’enfant, polychromes. La grande diversité des représentations est intéressante, certaines sculptures sont touchantes de naïveté. 

Empruntant une toute petite route pour rentrer au gîte, nous longeons des bois d'eucalyptus. Depuis 1980, cette culture est assez développée au Portugal. Les 550 000 ha plantés assurent 75% de la production de papier du pays.

Portugal  Photo P Nicolas
Portugal  Photo P Nicolas




Samedi 29 juin 2013


Portugal  Photo B Nicolas


Après avoir passé 3 jours dans cette région isolée du nord de l’Alentejo nous gagnons Évora au centre de la province. Ce nom "Évora" est le même que celui de la grande chanteuse cap-verdienne Évora (la chanteuse aux pieds nus). Puisque le Cap-Vert était une colonie portugaise jusqu'en 1975, je suppose que cette homonymie vient de là.
 Chaque matin, c’est le propriétaire qui nous sert le petit déjeuner.
La démission des deux ministres portugais fait tellement de remous dans le pays que, tout en nous servant, il écoute attentivement les infos à la télé et s’exclame en se tournant vers nous : si, en France, on vous faisait le quart de ce que le gouvernement nous impose vous mettriez le feu au pays ! Le couple belge acquiesce spontanément en hochant vigoureusement la tête. Puis la conversation dévie vers d'autres sujets.

La femme belge nous indique qu’il fait toujours très chaud à Évora, elle nous conseille de nous méfier vu la canicule de ces derniers jours.

Portugal  Photo P Nicolas

Nous arrivons vers 11h00 à Évora et laissons la voiture à l'extérieur des remparts. La ville qui compte environ 57 000 habitants s’est développée autour d’un centre historique fortifié, bâti sur un promontoire peu élevé au milieu d’une vaste plaine.
Considérée comme la ville portugaise la plus riche en monuments historiques après Lisbonne, et classée depuis 1986 au patrimoine mondial de l’UNESCO, Évora attire beaucoup de touristes


Portugal  Photo B Nicolas
Qu'il fait chaud ! La température serait encore plus éprouvante sans l'ombre des rues étroites de la vieille ville. Il n'y a pas un souffle d'air dans Évora. 
Les magasins de la rua Joao de Deus que nous suivons à présent sont dissimulés sous de solides arcades en pierre qui se prolongent sur tout le côté gauche de la Praça do Giraldo où cette rue débouche.
Le centre de la place sert de terrasse aux cafés voisins. Beaucoup de tables sont prises mais nous en trouvons une. 
Effectuant d’incessants allers-retours entre café et terrasse, les serveurs ont bien du mérite par cette chaleur.
Portugal  Photo P Nicolas
Portugal  Photo P Nicolas
Sur la place se dresse une imposante fontaine de marbre ceinturée de bancs du même marbre. Rien d’étonnant à cela, puisque le Portugal est le second exportateur de marbre au monde et que ses plus importantes carrières se trouvent ici, au nord-est de la ville.
Le bloc du marbre brut, posé à proximité de la fontaine semble être une allusion directe à la richesse du sous-sol.Si le marbre italien de Carrare est éblouissant sous le soleil en milieu de journée, celui d’Évora, déclinant une palette de tons beiges, conserve une grande douceur.

D’après le plan, notre hôtel se trouve à 150 mètres de la Praça do Giraldo, centre de la vieille ville. La chambre n’est disponible qu’à partir de 14h00, mais nous y allons quand même afin de voir s’il est possible d’y garer la voiture. 
Il n’y a pas de garage, mais l’accueil nous remet un badge autorisant de stationner à l’intérieur des fortifications sur une place réservée par l’hôtel. Parfait. J’appréhendais de devoir refaire le trajet, des remparts à l'hôtel en tirant nos valises par cette chaleur.

Portugal  Photo B Nicolas
Après avoir avalé un sandwich, nous partons à la découverte de la vieille ville. Sur le plan, la plupart des rues communiquent entre elles formant un maillage en toile d'araignée. Si l’habitat resserré nous procure de l’ombre, il n’aide pas à photographier certaines belles demeures et hôtels particuliers en raison du manque de recul. L'abord des églises est toujours plus dégagé.

Portugal  Photo P Nicolas

Portugal  Photo B Nicolas
Nous débutons les visites par l’église de São Francisco datant du XVe siècle et dont la nef unique est étonnamment large ; il s'agirait de la nef la plus large du Portugal. 
Accolé à l’église, un ancien cloitre abrite la Capela dos Ossos (chapelle des os). Son nom étrange tient au fait qu’elle est entièrement tapissée d’os et de crânes humains. Je n’en crois pas mes yeux  et me demande ce qui a bien pu pousser les moines franciscains de l’époque à une telle démarche. Cette mise en scène d’ossements humains témoigne d’un surprenant manque de respect. En revanche, j’ai bien aimé l’humour de l’inscription accueillant les visiteurs au fronton de la chapelle : "Nous les os qui sommes ici attendons les vôtres".
Portugal  Photo P Nicolas
Portugal  Photo B Nicolas
Des ruelles tortueuses nous conduisent à une cathédrale, moitié romane, moitié gothique. Bien que massif, l'édifice n’a pas cette allure de forteresse rencontrée à plusieurs reprises depuis notre arrivée. On y pénètre, côté ouest, par un porche gothique étroit et profond sous lequel de superbes statues (six de chaque côté) représentent les douze apôtres. Elles reposent sur une colonne cylindrique en marbre clair. 
Identifiable à son trousseau de clés, Saint-Pierre affiche un air détaché et absent qui rappelle quelque chose à mon épouse ; elle le photographie consciencieusement.

Portugal  Photo P Nicolas
Portugal  Photo B Nicolas

 Au nord de la cathédrale se dresse un temple romain en ruine. Il est situé sur une petite place rectangulaire précédant un jardin. Bien que ce lieu soit le point culminant de la colline, celle-ci est trop peu élevée pour offrir un panorama digne d'intérêt. En nous retournant, nous apercevons le chapeau dissemblable des deux tours de la cathédrale. Celui recouvert d’azulejos brille sous le soleil.

Portugal  Photo B Nicolas

Sur un côté de la place se tient l’Igréja de São João Evangelista, petite église discrète dont l’accès est payant. Nous ne regrettons pas d'y entrer car l'intérieur, absolument superbe, est recouvert d’azulejos retraçant la vie de Saint Laurent. 
Que l’on se sent bien ici ! La coloration pastel des azulejos qu’une lumière tamisée effleure crée une ambiance extrêmement douce. 
Je me surprends à faire le moins de bruit possible alors qu’il y a seulement deux autres personnes à l'intérieur du petit bijou. Comme la forteresse des templiers à Tomar, ce lieu a une âme.
Portugal  Photo P Nicolas
Portugal  Photo P Nicolas
Portugal  Photo P Nicolas

Après avoir passé l’après-midi à découvrir les richesses de la ville fortifiée, nous flânons du côté des boutiques et tombons sur une véritable caverne d’Ali Baba : un magasin occupant le rez-de-chaussée d’une maison ancienne dont les pièces peu restaurées, remplies d’étals et d’étagères, lui donnent un look entrepôt, très tendance. 
Nous trouvons les cadeaux que nous cherchions et ressortons en espérant que leur poids ne posera pas de problème à l’enregistrement des valises.
Après avoir dîné dans un petit restaurant de la vieille ville, nous rentrons à l’hôtel. Quel plaisir d’avoir une clim qui marche !




Dimanche 30 juin 2013


Portugal  Photo B Nicolas
Après ces jours de canicule, nous sommes heureux de rejoindre le littoral espérant y trouver un peu plus d'air. Quittant Évora à 09h00, nous remontons directement vers Lisbonne et franchissons l’impressionnant Ponte 25 de Abril à midi. 
(Son nom " 25 de avril" rappelle la révolution des oeillets du 25 avril 1974, qui mit fin à la dictature)

Ouvert en 1966 et long de 2228 mètres, ce pont suspendu enjambe le Tage à 70 m de haut, offrant un vaste panorama sur Lisbonne et le fleuve. Son passage est payant.
Rive droite, une longue bretelle de sortie nous fait rejoindre le quai Vinte e Quatro de Julho. Longeant le fleuve, nous poursuivons sur l’Avenida Infante dom Henrique avant de tourner à gauche et grimper la colline par la rua do Paraiso


Portugal  Photo P Nicolas
Le logement que nous avons loué se situe dans le quartier populaire l'Alfama, véritable labyrinthe de ruelles à flanc de colline. 
Notre point de chute, 11,Beco dos Pos, est une ruelle du labyrinthe inaccessible aux voitures. Dans nos échanges de courriels, la propriétaire nous a conseillé de stationner plus haut sur une place arborée proche du Panthéon qui abrite, entre autres, le tombeau d’Amalia Rodriguez, ce voisinage me plait bien.

Tirant nos valises, nous descendons jusqu’à la rua dos Rémédios, rue commerçante étroite à partir de laquelle on accède à notre ruelle. Dotée d'une borne télescopique ne laissant passer que les véhicules des résidents, la rua dos Rémédios est jalonnée de petits commerces et restaurants dont deux de Fado. L’endroit est sympathique, pittoresque. 

Problème ! Voilà que la rue redescend, vers le quai. Nous sommes allés trop loin, mais comment rejoint-on Beco dos Pos ?... Revenant sur nos pas nous finissons par trouver le passage au niveau d'un immeuble ancien en retrait de la rue dont le rez-de-chaussée est occupé par un restaurant de Fado. 
Là, il faut grimper un escalier-porche passant sous l’immeuble et ressortir, à l'arrière, au niveau du 1er étage sur une étroite ruelle. 
Assise sur son pas de porte, une jeune femme fumant une cigarette nous dévisage avec curiosité puis contemple nos valises. Seuls les habitués doivent emprunter ce passage si discret qu'il semble privé. Très courte, la ruelle où nous sommes débouche à l’intersection de plusieurs escaliers. 


Portugal  Photo P Nicolas
C'est là ! Nous reconnaissons l'immeuble vu en photo sur Internet. Le n°11 est celui de trois étages recouvert d’un joyeux crépi jaune, à l’intersection des escaliers.
Le sous-sol et le rez-de-chaussée sont en travaux, il n’y a pas de sonnette. Petit moment de flottement, four à 170°. 
Voyant notre embarras, une voisine nous indique une seconde entrée sur le côté droit de l’immeuble où débute un autre escalier de pierre. Avec les deux à gauche et celui d'où l'on vient, cela fait 4 escaliers soit 4 itinéraires possibles au pied de l'immeuble. Bienvenue dans le labyrinthe ! 
La porte a deux sonnettes. Personne ne bronche quand nous déclenchons la première. La seconde dérange une dame âgée qui ouvre et nous regarde avec surprise. Puis des exclamations retentissent dans son dos, une autre dame descend précipitamment, elle nous attendait et nous invite à la suivre. 

L’appartement est au troisième étage, mais étant entrés par le côté droit de l’immeuble, il ne nous reste qu’un étage à grimper. Vous me suivez ?
Après nous avoir montré l’appartement et le fonctionnement de l’électroménager, elle nous demande de déposer le prix de location dans une assiette sur la table du séjour, la propriétaire passera le prendre demain. Bien.
Des quatre fenêtres ouvrant sur la façade de l’immeuble, nous avons une jolie vue sur le Tage, les toits de l’Alfama et le labyrinthe.
Portugal  Photo B Nicolas
Nous redescendons rua dos Rémédiosacheter de quoi déjeuner. La boulangerie conseillée par la propriétaire nous fait bonne impression. Au retour, je compte pas moins de quatre épiceries dans la rue ; comment leurs propriétaires arrivent-ils à gagner leur vie ? Nous rejoignons 11 Beco dos Pos sans nous tromper !

Après avoir consulté le Cartoville de Lisbonne en déjeunant, nous décidons d’aller au centre-ville à pied. Notre plan signale un Posto tourismo dans le quartier de la Baixa, nous en profiterons pour y glaner quelques informations complémentaires. 
Un détail important nous échappe ; bien que précis, ce plan ne rend pas compte du relief de Lisbonne et la Baixa, cœur de la cité, est cernée de collines.

L’itinéraire que nous choisissons aurait probablement été le plus direct sur terrain plat, mais à l'évidence, il était impossible de trouver plus long. 
Après avoir grimpé plusieurs escaliers et ruelles, nous sommes désorientés. Continuant à grimper nous tentons de nous diriger vers l’ouest pour rejoindre la Baixa


Portugal  Photo P Nicolas
Arrivés presque au château nous descendons de l’autre côté de la colline par des ruelles si pentues qu’elles doivent se transformer en torrents les jours de pluie. Un petit escalier offre à présent deux options : gauche ou droite. Nous choisissons gauche. Bonne pioche ! Après un coude la ruelle pavée débouche soudain sur le trottoir d’une large rue bitumée au nord de la Baixa et je me surprends à éprouver de la joie en apercevant le bitume.
Cette rue rejoint la Praça da Figueira, belle place carrée communiquant avec une seconde place, toute en longueur, la Praça Dom Pedro IV que les habitants appellent Praça Rossio, nom de cette place au moyen-âge.
Portugal  Photo P Nicolas
Entre ces deux places, au nord, et celle du commerce ouvrant sur le Tage, au sud, la Baixa forme un curieux damier rectangulaire aux rues parallèles et à angle droit. C'est là que se trouvait le quartier médiéval détruit par le puissant tremblement de terre du 1er novembre 1755, lequel fut aussitôt suivi d’un raz de marée dévastateur et d’un gigantesque incendie. 
Ce séisme a causé la mort de 30 à 40 000 personnes. Sur les 56 églises que comptaient Lisbonne, seules 5 ont résisté.

Cerné de collines sur trois côtés, le damier de l’actuel centre-ville abrite la plupart des boutiques de luxes ainsi que les grandes enseignes de prêt-à-porter présentes dans les grandes villes de la planète. Où sommes-nous, à Lisbonne, à Paris, à Londres… ?


Portugal  Photo B Nicolas
Suivant la rua Auréa en direction du Tage nous découvrons une haute structure métallique de style néogothique rappelant les réalisations de Gustave Eiffel, l’Elevador de Santa Justa. Il s’agit d’un grand ascenseur de plein air permettant d’accéder à une terrasse panoramique surplombant la Baixa.
Après une pause dans un bar du damier, nous achetons une carte de métro 24h et réintégrons le quartier populaire de l’Alfama en longeant, les quais. 

Malgré le ventilateur, il fait chaud dans l’appartement. Nous ouvrons toutes les fenêtres en grand. Le petit espace séparant ruelles et escaliers au pied de notre immeuble est exploité par les voisins qui, à la nuit tombée, y installent leurs tables afin de dîner au frais. Bruits de vaisselle, conversations, rires nous parviennent par les fenêtres grandes ouvertes. Cette ambiance conviviale est plutôt sympa.
Après dîner, nous effectuons un petit tour dans le quartier dont l’atmosphère devient encore plus intime sous l’éclairage public orangé. 


Portugal  Photo B Nicolas
Certaines ruelles comportent des passages si étroits que nous devons raser le mur opposé pour ne pas déranger les personnes assises sur leur pas de porte. Quand les ruelles en escalier sont suffisamment larges, une rambarde est installée pour aider les personnes âgées. La topographie singulière du quartier nous donne sans cesse l’impression de pénétrer chez les gens. 


Portugal  Photo P Nicolas
Cette impression disparait dès que l’on quitte le labyrinthe pour rejoindre les petites rues commerçantes. Les restaurants de Fado sont bondés ; sur le seuil, des personnes remettent aux passants un prospectus détaillant le spectacle qu'ils proposent et le menu.




Lundi 1er juillet 2013


Portugal  Photo P Nicolas
Levé de bonne heure, je contemple à la fenêtre le va-et-vient de gros bateaux de marchandises remontant ou descendant le Tage. L'un d'eux est amarré depuis hier presque en face, à environ un kilomètre de la rive. Au loin, je vois distinctement la rive gauche, pourtant distante de 7 km, avec ses installations industrielles le long du fleuve.
La voiture louée à Coimbra doit être restituée ce matin à 09h00 dans le quartier Campolide, au nord de la BaixaMalgré la distance et notre méconnaissance de la ville, nous trouvons facilement l'agence. Le Campolide semble être un quartier d’affaires. La voiture une fois déposée, nous regagnons le centre-ville en métro. 
Celui de Lisbonne compte quatre lignes : une grande ligne principale traversant la ville et trois lignes secondaires. 

Descendant à la station Rossio, nous ressortons sur la grande Praça Dom Pedro IV nommée simplement Rossio. Rossio est aussi le nom de la gare construite en retrait à une extrémité de cette place. 


Portugal  Photo B Nicolas
On accède à la gare par deux entrées de style manuélin qui attirent mon attention. Leur forme arrondie me fait immédiatement songer à celle d'un fer à cheval. Est-ce intentionnel ou s’agit-il d’une coïncidence ?
Portugal  Photo P Nicolas
Portugal  Photo P Nicolas
Ayant l’intention de nous rendre en train à Sintra, nous entrons et achetons nos billets au guichet.
Située à une demi-heure de Lisbonne, Sintra est réputée pour son surprenant microclimat et ses palais où les rois du Portugal y venaient en villégiature. Nous avons l'intention de visiter en priorité le grand Palacio Nationale, très réputé.

Et le microclimat ?... 
Arrivés à Sintra, le soleil a disparu dans la brume. Le froid nous saisit en descendant de la navette, la température ressentie semble avoir chuté de moitié depuis Lisbonne ! La gare se trouvant en contrebas du village, y grimper à pied nous réchauffe un peu. Maigre consolation, rares sont les touristes ayant prévu un vêtement chaud.
Portugal  Photo P Nicolas
Portugal  Photo P Nicolas
  La visite du Palaçio Nationale nous enchante ; ce palais royal est véritablement passionnant. De superbes azulejos tantôt lisses tantôt en relief habillent couloirs et salons, les plafonds décorés sont splendides, les salles meublées contiennent un mobilier riche et varié.
Portugal  Photo B Nicolas
Portugal  Photo P Nicolas
Si l’influence mauresque est omniprésente, elle est absente de la pièce qui m’a le plus impressionnée, la salle des blasons. Une pièce carrée, coiffée d’un incroyable plafond en dôme recouvert de caissons de bois. Les murs sont recouverts d’azulejos reproduisant principalement des scènes de chasse. Salle absolument magnifique.
Portugal  Photo P Nicolas
Portugal  Photo P Nicolas
Portugal  Photo B Nicolas
En ressortant du palais-royal le temps est toujours aussi triste ; la brume enveloppant les crêtes de collines masque totalement le paysage. Trop peu vêtus pour visiter d'autres palais par ce froid nous décidons de rentrer à Lisbonne.
c’est avec bonheur que 30 minutes plus tard, nous retrouvons soleil et chaleur en quittant la gare Rossio. Qu’allons-nous faire du reste de la journée ? 
Nous sommes lundi, tous les Musées sont donc fermés. 

Si nous allions en tram à Belém ? 
Situé à l'ouest de la ville, ce faubourg de Lisbonne surplombe la portion  rétrécie du Tage, juste avant l’océan.
Portugal  Photo B Nicolas
Nous descendons du tram à côté du Mosteiro dos jerónimos (monastère des hiéronymites), imposant ensemble architectural, gothique à l’origine, mais revisité par le style manuélin. 
Intrigué par le mot hiéronymites, j’ai découvert qu’il désignait les moines membres de l’ordre des ermites de Saint-Jérôme. Ces moines suivaient la règle de Saint-Augustin et vivaient principalement au Portugal ou en Espagne. 

Couvert de statues, le portail sud de l’église est magnifique. Mais nous sommes lundi ! Les portes de l’église comme celles du monastère sont fermées.
Un groupe de jeunes touristes tente vainement d’ouvrir la porte du porche de l'église. Dommage que nous ne puissions visiter un si bel ensemble.
Portugal  Photo P Nicolas
Portugal  Photo B Nicolas
Alors que nous cherchons dans le guide quoi faire aux alentours, une Portugaise nous accoste. S’adressant à nous en français, elle se désole que le monastère soit fermé le lundi. Elle-même y travaille et le lundi est donc son jour de congé, mais elle est venue voir une amie assurant la permanence. Elle ajoute :
―  Le Palacio Nacional da Ajuda est ouvert le lundi. En plus de la visite, ils exposent actuellement les œuvres d’une grande artiste portugaise contemporaine, Joana Vasconcelos.
Joana Vasconcelos ! On connait !
― Ce n’est pas très loin, si vous voulez je vous y emmène…
Nous la suivons en pensant que le palais est tout proche, mais elle nous conduit à sa voiture et nous invite à y monter en s’excusant du capharnaüm à l’intérieur. Bref moment d'hésitation. Nous ne connaissons pas cette femme ; où va-t-elle nous emmener ? Percevant notre malaise, elle précise avec un sourire :
― Le palais royal est en haut de la colline, la montée est très raide et vous devrez redescendre à pied tout à l'heure...
Nous voici en route avec cette inconnue qui nous confie que la vie est très dure en ce moment au Portugal. Elle a la chance d'être fonctionnaire, mais tout le monde n'a pas cette chance. C'est la troisième personne, après le taxi de Coimbra et le propriétaire du gîte d’Alagoa, qui nous parle de la même voix découragée, des difficultés qu’ils ont actuellement à vivre au Portugal. 
Elle nous dépose devant l’entrée du Palais puis repart en nous saluant de la main. Nous ne savons même pas son nom !

Le Palacio Nacional da Ajuda est en fait un palais royal construit ici après le terrible séisme de 1755.
Je trouve son architecture plutôt lourde, surtout après avoir vu celui de Sintra, élégant et si raffiné. 
Certaines pièces du palais sont intéressantes ; il y a beaucoup de mobilier et d’importantes collections d’art décoratif sont présentées.
Peu attirés par la présentation des nombreux services de table des rois du Portugal, nous prenons plaisir, en revanche, à découvrir les œuvres délicieusement impertinentes de Vasconcelos. 
Portugal  Photo P Nicolas
Les œuvres de petit format sont présentées directement sur le mobilier, d’autres, plus volumineuses, occupent une salle entière. 

Portugal  Photo P Nicolas
Après la visite, nous descendons à pied jusqu’au Tage et achetons des Pasteis de Natta que nous dégustons sur le banc d’un jardin public. Délicieux !

Sur les quais de Belém, impossible de rater le Padrao dos Descobrimentos. 
Ce monument en pierre de 52 mètres de haut surplombe le fleuve.
Il a été réalisé sous la dictature de Salazar pour le 500e anniversaire de la mort d’Henri le Navigateur, et est censé glorifier ces navigateurs qui ont détruit la civilisation précolombienne. 
Ne souhaitant pas photographier un tel monument, c’est ma femme qui s’en charge.
Portugal  Photo B Nicolas
J’ai l’impression que les dictatures privilégient souvent l’aspect colossal et impressionnant dans leurs monuments. Aujourd’hui, c’est au pays qui aura la tour la plus haute du monde.
Bien que le Padrao dos Descobrimentos corresponde à ces critères mégalos, je dois reconnaitre que le bas-relief représentant les navigateurs a une certaine allure. 
Portugal  Photo B Nicolas
Nous rentrons en tram à Lisbonne et dînons à l’appartement avant d’effectuer une courte promenade dans le labyrinthe. Beaucoup d'habitants sont dehors, échangeant d’un pas de porte à l’autre. Certains ont sorti leur chaise, d'autres sont assis sur le seuil.




Mardi 2 juillet


Ce matin, le soleil est voilé quand nous partons à pied en direction de la Baixa.
Contournant la colline de l'Alfama, nous découvrons de nombreuses façades d’immeubles décorées d’azulejos. Leur style varie beaucoup suivant l'époque. Parmi les façades les plus anciennes, certaines mériteraient d’être restaurées.


Portugal  Photo B Nicolas
Après avoir pris le métro à la station Baixa, nous ressortons quelques stations plus loin à Martim Monitz sur une longue place aux extrémités arrondies, comme celles d’un stade. Le soleil réapparait timidement.
C’est d’ici que part le vieux tram 28 maintenu en service pour la joie des visiteurs. Nous ne sommes pas seuls ; un groupe de touristes attend déjà l’ancêtre. Le voilà ! Il arrive lentement et s’arrête dans un grincement sinistre.
Portugal  Photo P Nicolas
L’intérieur du tram est en bois. Sa capacité affichée est modeste : 20 Sentados, 38 de pé (20 places assises, 38 debout) Le trajet est rude, grinçant, vraiment pittoresque. Dans certaines rues il rase les murs. Voulant prendre une photo par la fenêtre, alors que nous circulons dans une rue étroite, j’ai frôlé une camionnette stationnant sur le trottoir.
Après avoir traversé les quartiers Chiado, Bairro Alto, Madragoa, Estrella, notre trajet s’achève près de la Basilica da Estrela, dernier édifice baroque construit dans la ville.

Cette basilique n’est pas d’un grand intérêt. L’intérieur donne une impression pesante, massive, désagréable. Un gardien nous vante la vue sur la ville depuis les toits. Nous achetons 4 euros le billet et nous nous faisons avoir car la vue est nulle depuis ces terrasses bordant le dôme.
Portugal  Photo B Nicolas
 Curieusement, le métro ne vient pas jusqu’au quartier Estrela ce qui nous oblige à prendre un taxi pour nous rendre à la fondation Calouste Gulbenkian. Cet Anglo- Arménien, magnat du pétrole et collectionneur d’art avisé, avait souhaité un Musée pour y rassembler ses collections (environ 6000 pièces) d’un éclectisme surprenant allant de l’art antique oriental à l’art européen. 
Son souhait fut exaucé en 1969 pour le plus grand bonheur des visiteurs. La salle consacrée aux bijoux art nouveau de René Lalique est unique au monde. Malheureusement, les photos sont interdites.
Une fois ressortis, nous décidons de déjeuner à l’appartement et prenons le métro de San Sebastião jusqu’à la station Apolónia au pied de notre labyrinthe.
Portugal  Photo P Nicolas
Après déjeuner, nous reprenons le métro jusqu'au centre-ville. À la station Baixa-Chiado, nous empruntons une sortie donnant sur la partie piétonne de la rua Garrett juste devant l'emblématique café A Brasileira où Fernando Pessoa (écrivain et poète né à Lisbonne), avait ses habitudes. 
Près de la terrasse du café, un bronze le représente, assis sur une chaise de bar, coiffé du chapeau qu'il portait si souvent. Son expression est songeuse ; il semble observer avec perplexité la clientèle bigarrée de touristes qui, tout comme moi, le mitraille du matin au soir.
Lisbonne  Photo P Nicolas
Lisbonne  Photo P Nicolas
Lisbonne  Photo P Nicolas
Le Chiado est un quartier commerçant très animé où se mêlent touristes et Lisboètes. Notre objectif est de monter au Bario Alto pour visiter l’église São Roque, considérée comme un chef d’œuvre du Baroque.
Arrivés devant São Roque, nous sommes surpris par la banalité de sa façade. Une fois à l'intérieur, nous le sommes encore plus par son délire baroque. Les murs sont couverts de ces talhas douradas déjà vues à Porto. Mais, ici, on peut les photographier. 
Impossible de trouver contraste plus saisissant entre extérieur et intérieur ! Si nous pouvions entrer dans la tête des autres, peut-être découvririons-nous un écart équivalent entre l'expression de leur visage et ce qui les agite à l'intérieur... 
Quoi qu'il en soit, j’ai vraiment du mal avec le baroque lorsqu’il atteint une telle outrance.
Portugal  Photo B Nicolas
Portugal  Photo B nicolas

Le nom du jardin bordant la colline du Bario Alto n’est pas des plus courts : Miradouro de São Pedro de Alcantara. La vue panoramique qu'il offre sur Lisbonne est impressionnante.
Portugal  Photo P Nicolas
On distingue les quartiers du nord, la Baixa au-dessous de nous, la colline d’en face coiffée du château puis le début de l’Alfama et enfin le Tage à droite.

Rejoignant l’Alfama, nous réservons une table pour 21h00 dans l’un des restaurants de Fado de la rua dos Remedios puis nous grimpons vers l’appartement par un nouvel itinéraire, le labyrinthe commence à nous être familier.


Portugal  Photo P Nicolas
Le restaurant est presque plein lorsque nous y arrivons. Au début, l’un des musiciens chante en s’accompagnant d’une mandoline. Il est bientôt remplacé par une jeune chanteuse dont la voix puissante surprend tant son physique est frêle. Elle vit tellement ce qu’elle chante que la salle est conquise.
Portugal  Photo P Nicolas
Portugal  Photo P Nicolas
Bien qu'il soit tard lorsque nous quittons le restaurant de Fado, certains habitants du labyrinthe prennent encore le frais dehors. Vu l'heure, les enfants dorment et les parents se détendent en discutant à voix feutrée devant leur maison. La plupart ont ouvert portes et fenêtres pour faire entrer un peu de fraîcheur avant de se coucher. La lumière blanche jaillissant de ces ouvertures contraste puissamment avec l'éclairage public jaune orangé, créant un jeu d'ombres irréel sur les murs et le sol des ruelles. 
À notre passage, les conversations s'interrompent brièvement ; dans les regards croisés au passage se lit l'étonnement de voir des touristes s'aventurer dans le labyrinthe à une heure aussi tardiveCes deux-là vont se perdre !




Mercredi 3 juillet

Portugal  Photo P Nicolas
De retour dans le Chiado nous traversons la Praça Luis de Camões au fond de laquelle se tient un ancien kiosque, récemment restauré, qui propose boissons et pâtisseries.

Au-delà de la place, la rua do Loreto s’enfonce dans le Chiado. Les trottoirs sont étroits. À notre gauche, la pente raide des rues témoigne de la hauteur des collines ceinturant la Baixa. La rue très étroite et raide que nous cherchons est la suivante, Rua de Bica Duarte Belo, exclusivement réservée au petit funiculaire reliant les rives du Tage aux confins du Chiado et du Bairro Alto
Portugal  Photo P Nicolas
Portugal  Photo P Nicolas
Portugal  Photo P Nicolas

 L'intérieur est en bois, une dizaine de personnes peuvent y tenir, il y a quelques places assises. Vêtue d'un pantalon sombre et d'un teeshirt beige, la conductrice conserve dans une sacoche qu'elle porte en bandoulière carnets de tickets et un peu d'argent pour rendre la monnaie. Elle pilote, debout, à l'aide d'un volant métallique muni d'une poignée.
Au bas de la descente, la cabine s’engouffre au rez-de-chaussée d’un immeuble et s’y arrête. Une fois descendus, nous poussons la porte de l'immeuble et débouchons dans la rua da Boavista tandis que d'autres personnes arrivent pour prendre le funiculaire en sens inverse.
Portugal  Photo P Nicolas
Portugal  Photo P Nicolas
Sur la façade de l’immeuble, le nom : Ascensor da Bica épouse l’arrondi de l’entrée. Vu le bruit de ferraille produit par ce funiculaire je n’aimerais habiter l’appartement du 1er étage, juste au-dessus.
Avant de gagner les quais pour effectuer une sortie en bateau sur le Tage, nous entrons au Mercato da Ribeira Nova, grand marché couvert, et y achetons des fruits frais.
Portugal  Photo P Nicolas
Portugal  Photo B Nicolas
Une fois le bateau à quai nous montons à bord et je suis étonné que nous soyons si peu nombreux dans ce grand bateau. Confortablement installés à une table sur le pont, nous dégustons nos fruits en découvrant Lisbonne depuis le fleuve. 
Portugal  Photo P Nicolas
Portugal  Photo B Nicolas
Vue superbe ! La ballade dure une heure. Longeant la rive droite, le bateau descend le Tage en direction de Belém. Passer sous l’immense ponte 25 de Abril traversé à notre arrivée nous permet d'apercevoir une seconde voie de circulation réservée aux trains, sous la voie principale.
Construite en saillie sur le Tage pour protéger la ville, la tour de Belém semble une protection bien dérisoire, aujourd’hui. S’éloignant un peu plus de la rive au retour, le bateau nous offre une vue d’ensemble très intéressante sur Lisbonne. 
Portugal  Photo P Nicolas
Cais do sobre est le nom de la gare, ouest, de Lisbonne sur les quais. Nous y prenons le  métro et descendons à la gare Apolónia, côté est, au-dessous du quartier de l’Alfama où nous logeons. Cinq minutes nous suffisent pour rejoindre l’appartement par le labyrinthe.

Après déjeuner nous redescendons à la gare Apolónia prendre un bus desservant le Musée National d’Azulejos. Il nous faut un certain temps sous l’abribus pour déchiffrer le panneau des destinations, mais nous finissons par trouver la bonne ligne.
Situé dans un quartier que nous ne connaissons pas, le Xabregas, au sud-est de la ville, ce musée est abrité dans le couvent Madre de Deus, couvent du XVIe siècle largement colonisé ensuite par le baroque. 
Portugal  Photo P Nicolas
Là, sur deux étages, sont présentés 500 ans d’histoire du fameux carreau de 14X14 cm, l’Azulejo, depuis ses origines jusqu’aux dernières créations contemporaines du XXIe siècle.
L’excellente démarche pédagogique de la présentation permet de comprendre aisément les bases de cet art et de suivre avec plaisir ses évolutions et influences. La démarche est adaptée à un public scolaire avec des vitrines présentant les étapes successives de fabrication ainsi que les variantes apparues au cours des siècles. Le parcours de la visite est véritablement passionnant, nous nous y attardons deux bonnes heures.
Portugal  Photo P Nicolas
Portugal  Photo P Nicolas

Pour notre dernière soirée à Lisbonne nous avons prévu de dîner dans un restaurant gastronomique situé tout près de notre labyrinthe, le FAZ Figuera.
Le maître d’hôtel nous propose de dîner en terrasse où la vue sur le Tage est superbe.
Portugal  Photo P Nicolas
La carte des menus semble à la hauteur du cadre. Nous prenons un plat et un dessert. Une serveuse nous apporte des mises en bouche tièdes et une coupelle de toutes petites olives au goût très fin. 
Le plat arrive. Ma femme a choisi un filet mignon avec une sauce à base de tomates et fines herbes, j’ai choisi un pavé de mérou avec des écrevisses et divers coquillages cuits au vin blanc. Délicieux ! 
Portugal  Photo B Nicolas
Portugal  Photo P Nicolas
Tandis que nous dînons, un groupe d’une trentaine de personnes envahit la terrasse et s’installe à une longue table préparée à leur intention. Presque tous parlent français et leur conversation nous laisse penser qu’il s’agit de scientifiques en congrès. 
Il fait nuit depuis un moment lorsqu’un serveur nous apporte un dessert glacé superbement présenté. Lorsque nous quittons le restaurant, le Panthéon au-dessus de nous est illuminé. Nous rejoignons le labyrinthe en flânant dans les ruelles de l'Alfama.




Jeudi 04 juillet


Portugal  Photo B Nicolas

Le train pour Porto n’étant qu’à 11h30, nous allons à pied jusqu’à la cathédrale en longeant le quai. Elle est située au pied le la colline de l'Alfama, tandis que le château en occupe le sommet.
Approchant du bâtiment, nous découvrons des orangers au bord de la rue. Les oranges tombées sur le trottoir et dans le caniveau ne doivent pas être comestibles car personne ne les ramasse.
Portugal  Photo P Nicolas
Portugal  Photo P Nicolas


Le train est ponctuel, nous partons à l'heure. Vers midi, de nombreux voyageurs déjeunent à leur place, étalant leur casse-croute sur la tablette amovible. Nous les imitons et déjeunons d’un sandwich.
En sortant de la gare à Porto, j’ai l’impression qu’il fait aussi chaud qu’à Lisbonne. Le taxi nous dépose devant le petit hôtel ou nous avions retenu la dernière nuit de ce séjour.
Ensuite, nous découvrons le quartier à pied et dînons dans une brasserie. Contrairement au dîner gastronomique de la veille, la cuisine est assez basique. Néanmoins, elle est très correcte et copieuse, boisson comprise, nous payons 15 euros pour deux ! Qui dit mieux ?




Vendredi 05 juillet

Départ de l'aéroport Francisco Sá Carneiro à Porto
Portugal  Photo B Nicolas
Portugal  Photo P Nicolas


Quelques infos sur le Portugal : 
  • -          10.561 600 millions d’habitants (2011)
  • -          92 000 km² avec Madère et les Açores
  • -          561 km  de long sur 218 de large
  • -          Premier producteur européen de liège ( le pays produit 52% de la production mondiale de liège)
  • -          2e exportateur au monde de marbre

Quelques infos sur Lisbonne :
  • Située dans l’estuaire du Tage, Lisbonne compte 547 800 habitants, et l’agglomération plus de deux millions. 
  • La ville ancienne occupe sept collines sur la rive droite du Tage,
  • Lisbonne est reliée à la rive gauche par le Ponte 25 de Abril, l’un des ponts les plus longs d’Europe.


Quelques infos sur Porto :
  • Seconde ville du pays avec 237600 habitants, l’agglomération en compte 1 800 000.
  • Son centre historique est classé depuis 1996 au patrimoine mondial de l’UNESCO.
  • Porto est jumelée avec la ville de Bordeaux.


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